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Il y a ceux qui donnent
des leçons, et puis, qui, avec leurs millions ramassés
ici et là, maltraitent le cinématographe et
lui ordonnent de réaliser, sous la menace, service
contentieux et tout… un chier-d’œuvre, qui veut bien
un peu de ses salons lustrés dans ses festivals internationaux
et autres halls de gare en perdition, qui prennent tous les
voyageurs pressés d’être des nombrils neufs
: ceux-là, en l’an deux mille de notre ère expéditive,
nous les appelons des réalisateurs, aussi, mais
pas comme Georges Méliès, Orson Welles, Friedrich
Murnau, et Fritz Lang… pour mémoire !… vous vous
souvenez ?… c’était bien !… " faux "
et " merveilleux ", bien sûr, et
c’était bon, une évasion inespérée !
Et eux, Welles, Lang, et ceux qui les remercièrent
et poursuivirent leur chemin, eux, à défaut
de nos " réalisateurs 2000 ",
ils crèvent en laissant une œuvre considérable…
et s’exposent, osent… et renouvellent les genres, et en piétinent
des clichés effroyablement inconsistants ! Excusez-moi
du peu, mais je n’entends plus rien battre dans mon cœur,
maintenant, mort, etc… etc… Ah ! il ne faut pas avoir
honte pour pisser sur les " squelettes gelés ",
qui ont de l’Histoire sur tout le corps consumé et
qui est resté sur des milliers de mètres de
pellicule, taillée dans la persévérance !…
Toutefois, restons calme ;
on pourrait me reprocher tant de choses et… Allez, il ne s’agit
pas de s’expliquer, de vous faire avaler toutes sortes de
cachets qui suent impunément, s’installeraient dans
votre estomac, et provoqueraient des colères acides…
Mais il faut dire que j’aime bien raconter le mal qui me travaille
parfois, et avec le cinéma, j’en prends lourd !…
et je souffre !… Pour exemple, un bout, une bribe, une
cicatrice : je sortais d’une salle bon marché,
où l’on fait du commerce avec des denrées sucrées,
qui brillent et font du bruit, et " appellent "
bien les dents, et même celles de derrière, elles
qui se foutent du film, et, brusquement je dois dire, je me
vois maudire ce que j’ai vu : parce que
je n’en peux plus, et qu’il faut tout dire, que c’est de la
merde, ces images sans verbes, sans chair(s), prévisibles,
alors que le cinéma n’est pas né pour ça :
pour être prévisible !… Que c’est trop,
ces petites silhouettes qui se montrent, le museau en l’air,
comme de vulgaires copies, et aussi ces types, bien entendu,
avec leur œil au prix de… de… c’est le nombre de lignes qui
décidera ; ces types, cachés dans des rédactions
sous contrôle de grand groupe dont la répression est
le sport favori ; ces types, endormis dans leur fauteuil,
trois mois avant la sortie nationale, et qu’on voit de qui
il s’agit, que ce n’est pas la peine de s’arrêter et
que je continue alors, je dis ces type qui savent lire une
feuille de paye, et vous la déchiffrent parfaitement,
dans son intégralité, et la redressent, parce
qu’ils la connaissent bien, et qu’ils vous diront qu’ils ont
assez " galéré ", et " bourlingué ",
que ça suffit, et que nous ferons pareil, paraît-il,
bientôt ; je sais, je sais, il y en a !… il
y en a !… c’est vrai, de jeunes loups, les lèvres
suceuses, qui mouillent bien du soir au matin, comme le sale
temps, et qui aiment bien les vieux, ces types, je le répète,
qui restent propres –et nous le font dire - sous prétexte
qu’ils " surveillent "… " surveillent ",
et que leur uniforme doit rester impeccable… et leurs jugements,
irrévérencieux… alors que rien n’explique vraiment
les " images animées "… mais qu’il
y a quand même ceux qui font peut-être exprès
de tout pourrir, et ce, sous l’égide -et la protection
toujours naïve- humaniste du cinématographe… et
en profitent, en ricanant longtemps… longtemps…
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Ca me désole, je
saigne et panse mes plaies, je vais arrêter là,
alors que j’entends encore le conseil à la mode faire
des petits, engrosser tout et n’importe quoi, tant que ça
rentre, un conseil qui n’hésite pas à annoncer
cela : " achetez-vous une caméra
numérique, et faites vos films, soyez audacieux ! "…
Mais surtout, et je me permets d’ajouter, " restez
à votre place, j’aimerais que vos petits films vidéos
ne dépassent pas quelques dizaines de spectateurs,
quand même… Vous verrez, vous aimerez l’ " UNDERGROUND " !…et
puis, ah ! j’oubliais, pas de scandale : nous sommes
sur écoute. Qui ça ? L’état… bien
sûr !…et… et… les autres… ". L’état,
je connais ; l’état, qui confirme sa rigide hypocrisie,
et qui n’aime pas le cinéma ; ne l’a jamais aimé,
du reste. Et l’Histoire du cinématographe témoigne
en ma faveur. L’Etat qui hait, plus précisément,
ceux qui savent s’en servir, du cinéma, ce qui est
un don rare et courageux. Et je dis, à partir de cet
instant où je tape ces litres de lettres mouillées
comme le sang qui saute aux yeux, et c’est fâcheux,
je dis : " ras le bol de vous conseiller, jeunes
auteurs, de faire des films ; et de faire ce que vous
voulez. Parce que ce n’est pas vrai, et ça ne le sera
jamais ! Pour ma part, en ce moment, je me contente de
suivre mon instinct, de faire marcher une caméra 16
mm, peut-être volée, et créer le
reste : du scandale qui ne jure pas ; et provoque
à l’intelligence, plus qu’autre chose !... et
démerdez-vous ! "
Cependant, il faut savoir :
qui dit scandale incontrôlable, opérable à
vif, écorchée, dit censure d’état… qui
dit cul, cris, saletés, éjaculations labourées
-et je pense à la " farce X qui se baise "-
dit aussi censure d’état, et, dans les deux cas, le
même sac ; qu’au moins, le plus violent témoin
des deux, le plus déstabilisant, celui qui (re)cueille
les âmes et les pousse au refus de l’existence réelle,
passe à la trappe ! Définitivement !
Mais ça, c’est pour plus tard… parce que j’arrête
là !
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